Notre diable qui êtes odieux (5)
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Mais, le jeudi soir, alors qu'elle était encore penchée à sa fenêtre, Madame Gardan entendit parler chez Marise. Elle s'appprocha du mur mitoyen, et, ne comprenant pas assez clairement ce qu'il se disait chez sa voisine, elle y colla son oreille. Voici, ce qu'elle entendit :
"Mon prince, je vous attendais..."
"Je le savais" dit-il d'un ton neutre. Il gardait toujours son sourire énigmatique.
"J'ai quelque chose à vous demander."
"Allez-y" répondit-il sur le même ton.
"Je voudrais vivre avec vous"
"Cela ne tient qu'à vous et à votrre vie"
Voilà ce que Madame Gardan entendit ce soir là. Le lendemain, elle courut à l'épicerie pour tout raconter. Madame Taupin, fort intriguée par ce récit, proposa à cette chère Madame Gardan d'attendre avec elle que Marise vienne faire ses courses comme chaque vendredi.
Mais Marise ne vint pas de la journée.
Les jours qui suivirent(, les volets de Marise restèrent clos. Personne dans le village ne vit la jeune femme de la semaine. Le vendrei suivant, elle ne vint pas non plus faire ses courses. Il y avait quelque chose d'anormal, l'angoisse régnait sur les visages maintenant.
Madame Taupin, Madame Gardan, ainsi que les autres femmes du village se décidèrent enfin à aller frapper chez Marise pour voir, savoir si elle n'avait besoin de rien.
Leurs coups résonnèrent dans le vide. Personne ne venait leur ouvrir. Que pouvait bien cacher cette porte ?
Alarmées, s'excitant entre elles de babillages, elles décidèrent de prévenir les gendarmes.
Ils mirent plus d'une heure à arriver sur les lieux. Ils étaient au bistrot et Madame Cancannier avait eu du mal à les trouver et à les convaincre de venir. A quelques mètres de la maison de Marise, le chien qui les accompagnait se mît à aboyer très fort, refusant d'avancer.
Les gendarmes frappèrent eux même deux, trois fois fois pour vérifier les dires des bonnes femmes et finalement enfoncèrent la porte.
Quand elle céda, une odeur nauséabonde leur sauta aux narines.
Marise était là, étendue. Elle gisait dans son flot de désespoir et d'amour. Elle gisait dans son sang. Elle s'était ouvert les veines.
Etrangement à côté d'une bouteille de Bordeaux vide, trainaient deux verres sur la table ainsi qu'un cigare dans le cendrier. Sur les deux verres et sur le cigare, les gendarmes retrouvèrent les marques du rouge à lèvres de Marise.
Aussi, bien que personne ne vende de cigares dans le village, ils ne cherchèrent pas plus longtemps et en conclurent que Marise, prise par l'alcool et la folie, s'était ôtée la vie.
La porte de la chambre claqua, ramenant le calme dans la pièce.
Madame Gardan, tremblante, resta un moment immobilisée puis, encouragée par un coup de coude de Madame Taupin, avoua aux gendarmes avoir entendu un homme le jeudi de la semùaine passée.
Elle parla de Prince, de mariage et de départ mais ils la prirent pour une folle.
Accompagnée par l'un des gendarmes qui l'invitait à sortir de la maison, elle ajouta :
"Pourtant, je ne suis pas folle, j'ai entendu quelqu'un."
"Ce devait être Marise qui faisait le ventriloque !" lui répondit ce dernier en riant.
Madame Taupin avait rejoint les autres femmes et commençait à se demander avec elles, si Madame Gardan n'avait pas perdu la tête.
Madame Gardan, elle, se tût à partir de ce jour là. Son mari, agacée par le comportement de sa femme qui ne quittait plus des yeux le mur mitoyen, la quitta.
Et un soir, elle entendit frapper à la porte de sa chambre.
FIN